lundi 19 avril 2010

l'éternité et un jour (Théo Angelopoulos - 1998)

Spleen d’un auteur enlisé dans les vicissitudes de la vie, Angelopoulos tente d’extraire l’homme de son enveloppe d’artiste afin de pouvoir le restituer au monde. Alexandre, confronté à sa propre vie, découvre alors une existence vidée de toute sa matière. Dans cet environnement dénué de tout artifice, la solitude et les affres du futur constitueront l'essentiel de l’univers du protagoniste.

Pourtant, malgré la vacuité existentielle du principal personnage, c’est une œuvre d’une rare richesse qui nous est offerte. En effet, « L’éternité et un jour » est une véritable leçon de poésie où la beauté déchire la grisaille omniprésente pour s’infiltré tout au long du film. Esthétiquement époustouflant, le réalisateur s’appui sur une myriade de thèmes aussi variés que la quête d’identité, l’amour et le désarroi pour donner à son œuvre une incroyable consistance. A la fois intimes et communs, les axes de réflexion de l’homme-artiste bascule souvent de l’introspection à l’observation du monde. Par ailleurs, ce long-métrage constitue une mise en abime dans laquelle l’art observe l’artiste dans son incapacité à créer. Par-delà l’imagination, c’est dans la communication que réside l’obstacle empêchant le poète d’accomplir son œuvre.

Alexandre croisera alors le chemin d’un jeune immigré qu’il s’évertuera à aider par tous les moyens. Au cours des avatars de notre couple de personnage nous serons ainsi immergés dans une vision humaniste et poétique de la vie.

Soulignons pour finir la merveilleuse beauté de ce film. L’image des observateurs inertes se tenant derrière les grillages lors du passage à la frontière, et semblant évoquer une partition musicale, est une image récurrente dans ce film. En effet, à de nombreuses occasions (le mariage, la morgue.) la même image apparait mettant en scène un jeu de miroir qui place le spectateur face à lui-même. Par ailleurs, au cours d’un merveilleux plan séquence déplaçant le récit un siècle plus tôt, Angelopoulos offre par cette continuité une incroyable harmonie au récit d’Alexandre. Le point culminant du film étant porté enfin par la mythique et mystique scène du bus. Ce choix est d’autant plus astucieux qu’il symbolise parfaitement le déplacement dans le temps et dans l’espace commune à l’ensemble des œuvres du septième art ! L’autobus va alors s’apparenter à une salle de cinéma dans laquelle Alexandre va prendre à son tour la place du spectateur et assister à un enchainement de scènes où s’enlaceront le passé et le présent, le rêve et la réalité, révélant différentes facettes du réalisateur (le révolutionnaire, l'amoureux, l'artiste.).

lundi 5 avril 2010

Home from the hill (Vincente Minnelli - 1961)

Constituant indéniablement une réflexion sur les valeurs parentales, ‘’Home from the hill’’ présente la perversité et les vices, indissociables de l’humanité, tout en soulignant leurs conséquences. Du cadre formé par la famille bourgeoise autour de laquelle s’articule l’histoire, il ne transparait plus que les lambeaux d’un bonheur révolu. Le père présenté comme infidèle et manipulateur, souille l’honneur de sa famille tout en affichant une profonde aversion envers tous les siens. De son coté, la mère s’approprie l’exclusivité de l’éducation de son fils et le surprotège. C’est dans cette ambiance délétère que Théron, adolescent jusqu’ici bloqué à l’enfance, va se retrouvé projeté vers l’âge adulte avec comme seuls modèles les déchirements de la cellule familial.

La vie nous est alors présentée comme une joute perpétuelle nous opposant à la cruauté du monde, mais surtout à nos propres démons. En effet, la transition menant le jeune Théron à la maturité est symbolisée dans ce film par une partie de chasse épique durant laquelle il devra affronter ses propres faiblesses en se mesurant à un sanglier particulièrement féroce.

Par ailleurs, Vincente Minnelli semble vouloir nous révéler que la nature farouche de l’homme se révèle dans la solitude. Les principaux protagonistes de ce film, isolés à causes de leur incapacité de se comprendre entre eux, se révèlent alors lunatiques, égoïste, tyranniques, méprisant, peureux… Pourtant ceci n’est qu’une facette dissimulant le découragement qui accompagne un réel désir de bonheur et d’amour.

Pour finir, “Home from the hill” tangue opiniâtrement entre optimisme et pessimisme. En effet, le réalisateur semble jouer un jeu cruel en insufflant à plusieurs reprises une lueur d’espoir à ses protagonistes, afin de la balayer l’instant d’après comme on soufflerait sur la mèche d’une bougie salvatrice. La promesse fugace d'une fin heureuse aboutira à un nouvel échec, car la réconciliation inespérée des parents sera aussitôt éclipsée par l’assassinat du père, plongeant inexorablement l’ensemble des personnages dans un nouvel abîme.