Le casino, c’est cet univers onirique confiné entre quatre murs où le noble éprouve - une fois n’est pas coutume - de l’empathie pour le traine-misère. Ainsi, le jeu devient cet allié infidèle sur lequel on se repose aveuglément. Car en chatouillant les narines du hasard, on se persuade qu’il est possible d’en percer les secrets. C’est en tout cas l’analyse que fait Dostoïevski dans ce roman « autobiographique » où, plus les personnages s’enlisent dans un maelström de défaites, plus leur appétit de jouer semble inextinguible! Comme le soutiennent les joueurs de Mah-jong, une partie n’a d’intérêt que lorsqu’on mise de l’argent. En une seconde le monde cesse littéralement de tourner et tout n’est que futilité excepté l'issue jeu ! C’est paradoxalement jubilatoire et oppressant, l’ivresse monte tandis que tous les membres sont pris de tremblements compulsifs et que le sol se dérobe sous nos pieds. La seconde d’après, tout devient irréel. Les chanceux se sentant porté par un souffle divin tandis que les malheureux sentiront leur être s’enfoncer dans les abîmes! Par ailleurs, cette œuvre satirique puise sa force dans la description caricaturale de citoyens venants de différents pays Européens (Français, Anglais, Polonais, Russes.) ainsi que dans une critique acérée portant sur la nature humaine. Finalement, on constate que le jeu accompagne une grande partie de nos actes. Dans la séduction, lorsqu’on recherche à s’attirer les faveurs d’autrui, qu’on teste leur crédulité, qu’on excite volontairement ses auditeurs par une argumentation provocatrice ou encore qu’on s’attèle à mettre à jour quelque secret, il s’agit toujours d’un jeu. Sans doute aux antipodes de ses autres livres, le ton léger arboré dans « le joueur » permet la succession de situations burlesques qui pourrait donner naissance à une formidable pièce de théâtre. On appréciera enfin l’élégance de ce personnage loufoque qu’est Alexis Ivanovitch (alter ego tout juste dissimulé de l’auteur) et l’évolution des sentiments qu’il nourrira pour Pauline.